L’IA créative a-t-elle un impact dans la formation en santé ?

Mercredi 29 novembre, le technopôle santé de la métropole dijonnaise Santenov organisait son forum IA4Care. Particularité cette année, l’évènement qui dure habituellement deux jours s’est tenu sur une soirée et sous le format de la table-ronde. Pour l’occasion, un plateau avait été installé sur le campus ESEO pour pouvoir retransmettre en direct l’évènement. Au programme : l’impact de l’IA créative dans la formation en santé.

L’IA créative a-t-elle un impact dans la formation en santé ? Les invités de la table-ronde IA4Care en débattent. (Crédit : ON HEALTH)

Pour en débattre, Rémy Teston, expert e-santé et fondateur du média Buzz e-santé, recevait Manon Ansart, enseignante-chercheuse au Laboratoire d’étude de l’apprentissage et du développement (LEAD) à l’université de Bourgogne, Wandrille Bonnet, directeur des produits chez Wooclap, Marc Gardette, directeur technique adjoint chez Microsoft France, Youssef Mourchid, enseignant-chercheur et data scientist au LINEACT du CESI de Dijon, et Emmanuel Simon, directeur du centre de simulations au CHU Dijon Bourgogne.

IA créative dans la formation en santé, de quoi parle-t-on ?

Lorsqu’on parle d’intelligence artificielle, de quoi parle-t-on réellement ? « Ce sont des algorithmes qui cherchent à imiter les capacités cognitives humaines pour essayer de se rapprocher de plus en plus du fonctionnement du cerveau humain, par exemple », définit Rémy Teston. Les intelligences artificielles génératives, créatives, sont plus spécifiquement des algorithmes qui vont créer de nouveaux contenus à partir de contenus existants. « On observe aussi une réelle transformation des pratiques médicales, poursuit-il, avec un impact significatif dans certaines spécialités comme la radiologie, sans même parler de l’optimisation du suivi des patients. »

« Une des spécificités peut-être de la formation en santé, c’est que la quantité des compétences et des connaissances à assimiler au cours des études est très grande, d’où l’intérêt pour les étudiants d’optimiser leur temps d’apprentissage, souligne Wandrille Bonnet. Les enseignants pourront aussi utiliser l’IA pour gagner du temps et leur permettre de le réinvestir pour un suivi plus personnalisé des étudiants ou sur d’autres activités. »

Utiliser l’intelligence artificielle pour former les professionnels de santé, mais aussi former les professionnels de santé à l’utilisation de l’intelligence artificielle ? « L’IA peut apporter énormément de choses dans beaucoup de points du parcours de soins, à condition que les professionnels de santé sachent utiliser ces outils pour en tirer le meilleur profit possible dans leur travail et dans l’accompagnement des patients », reconnait Manon Ansart. Le fait de pouvoir se former à l’utilisation de ces outils va donc leur permettre de participer à la réflexion et à la création de ces outils pour permettre d’avoir des outils pertinents et qui répondent aux besoins des professionnels de santé.

L’IA pour générer des cas cliniques ?

« L’intelligence artificielle peut être intégrée dans les processus de formation des professionnels de santé de plusieurs manières, détaille Youssef Mourchid. Ça peut être à travers des simulations de cas cliniques, notamment dans la formation des physiothérapeutes ou encore des professionnels de la rééducation. Un autre point très intéressant lorsqu’on utilise l’intelligence artificielle pour la formation, c’est que les apprenants peuvent répéter autant de fois que nécessaire ces exercices pour renforcer leurs compétences, ce qui n’est pas possible lorsqu’on travaille avec de vrais patients tout en limitant les erreurs potentielles. »

Une activité qui intéresse tout particulièrement le Centre de simulations du CHU Dijon Bourgogne comme en témoigne son directeur, Emmanuel Simon : « La simulation, c’est une méthode d’apprentissage qui se développe considérablement en santé. Le principe étant “jamais la première fois sur le patient”. Un centre de simulation propose à la fois des activités de simulation procédurale avec des mannequins, mais aussi de la simulation numérique avec des casques de réalité virtuelle, des simulateurs chirurgicaux, d’échographie, et pour faire des gestes en radiologie interventionnelle, ou encore, de la simulation pleine échelle où nous avons des environnements immersifs avec des professionnels qui vont travailler de manière synergique, le tout pouvant être retransmis dans une salle de classe. » Pourtant, complète-t-il, ce monde de la simulation est pour le moment encore étranger au domaine de l’intelligence artificielle, qu’il reconnaît être une somme de travail considérable pour fabriquer des scénarios ou encore pour évaluer les apprenants.

Microsoft, acteur auprès des professionnels de santé

Depuis maintenant de nombreuses années, Microsoft est un acteur présent auprès des professionnels de santé. Si, pour Marc Gardette, le directeur technique adjoint de Microsoft France, la firme manque encore de recul, l’intelligence artificielle pourrait trouver plus d’un usage dans ses technologies. « Beaucoup d’enseignements ont dû être fait à distance à cause du Covid, rappelle-t-il. Aujourd’hui, grâce à l’intelligence artificielle, on peut considérer que ces cours, s’ils sont enregistrés, deviennent des objets interrogeables. C’est ce que nous utilisons dans nos meeting Teams et c’est ce que j’appelle de l’enseignement personnalisé et autodirigé. » Mais si on parle beaucoup d’enseignement, on évoque moins l’aide à la communication orale et écrite, poursuit Marc Gardette : « un modèle de langage tel que GPT a un volume de connaissances important, mais il n’a pas tous les concepts et n’est pas suffisamment précis. On a récemment fait un prototype dans un CHU dans le sud de la France où on a utilisé les capacités de traitement linguistique et sémantique du modèle pour aller chercher l’information sémantique dans des documents qui existent et, entre autres exemples, on a fait un chatbot sur la prescription d’antibiotiques. »

 

Pour en savoir plus, retrouvez le replay de cette table-ronde. À noter que le Forum IA4Care dans son format initial revient dès 2024, les 16 et 17 mai.

Antonin Tabard

Le Doyen de l’UFR des Sciences de santé Marc Manaydié a accueilli chez ESEO, en tant que président de Santenov, Wandrille Bonnet, Emmanuel Simon, Manon Ansart et Youssef Mourchid, pour une table-ronde animée par Rémy Teston. (Crédit : ON HEALTH)