Un médicament contre le cancer du sein bientôt utilisé contre une maladie génétique rare ?

Des chercheurs de l’équipe Génétique des anomalies du développement du Centre de recherche translationnelle en médecine moléculaire de l’université de Bourgogne et de la FHU Translad conduisent actuellement un essai clinique au sein du Centre d’investigation clinique du CHU Dijon Bourgogne pour démontrer l’efficacité de l’alpelisib chez des patients atteints du syndrome MCAP, une maladie génétique rare.

Le Centre d’investigation clinique du CHU Dijon Bourgogne mène actuellement un essai clinique pour démontrer l’efficacité chez des patients atteints d’une maladie génétique rare d’un médicament jusqu’alors utilisé dans le cancer du sein. (Crédit : ON HEALTH)

« Au total, 18 patients venant de neuf centres répartis en France vont être traités pendant deux ans avec ce médicament produit par Novartis et déjà indiqué dans le traitement du cancer du sein, détaille le docteur Maxime Luu, médecin pharmacologue au sein du Centre d’investigation clinique du CHU Dijon Bourgogne. Nous évaluerons, en partenariat avec l’Hôpital Necker à Paris, les patients tous les six mois, à la fois cliniquement, biologiquement, ou encore avec de l’imagerie médicale et des tests neuro-cognitifs, pour vérifier l’efficacité, mais aussi la sécurité de ce médicament. »

Un gène commun au cancer du sein et à cette maladie génétique rare

À l’origine de cette étude portée par le professeur Laurence Faivre, responsable du centre de génétique du CHU Dijon Bourgogne, le constat que l’alpelisib inhibait le gène PIK3CA qui, lorsqu’il est hyperactivé lors de son expression, peut créer certaines formes d’hypercroissances comme des cancers, des tumeurs ou encore des malformations. Jusqu’alors indiqué dans le cancer du sein, ce médicament pourrait donc avoir une efficacité contre le syndrome MCAP qui est notamment dû à une hypercroissance localisée au niveau du cerveau. Un autre essai clinique avait déjà démontré que ce médicament permettrait de réduire les hypercroissances touchant certaines régions du corps des patients, et améliorerait ainsi les douleurs, la fatigue et la qualité de vie. Il reste néanmoins à prouver l’efficacité de ce traitement chez les personnes présentant des atteintes cérébrales. « Sesam est le premier essai mondial dédié aux patients atteints du syndrome MCAP. Il permettra, si le médicament fait ses preuves, d’autoriser l’utilisation de l’alpelisib en soins courants », explique le docteur Maxime Luu. Résultats finaux attendus pour 2027.

Cette maladie rare d’origine génétique crée des troubles des apprentissages, accompagnés éventuellement d’une déficience intellectuelle et d’une hypotonie. On observe parfois des crises d’épilepsie, associées ou non à une hypercroissance des membres ou des extrémités et des anomalies vasculaires cutanées. En 2020, plus de 200 cas de cette maladie génétique rare sont rapportés dans le monde sans prédominance de sexe.

Un centre d’investigation clinique au services des cliniciens et des industriels

Au CHU Dijon Bourgogne, le Centre d’investigation clinique est une unité de soins labellisée Inserm qui conduit des essais cliniques. Avec deux lits d’hospitalisation et deux box de consultation, il peut accueillir jusqu’à quatre patients simultanément et traite, en moyenne, une cinquantaine d’études en même temps, incluant jusqu’à plusieurs centaines de patients. Ce centre travaille pour les cliniciens, mais aussi pour les industriels puisque les équipes peuvent aider à la construction de l’étude clinique, la conduire et même analyser les résultats et les publier.

Antonin Tabard